Nous voilà au premier jour du Têt. Les préparations du Nouvel An vietnamien ont été longues et frénétiques, jusqu’à vendredi où vraisemblablement, tous les achats avaient été faits par les familles préparant au minimum une semaine de festin. Le pouls de la ville s’est ralenti en fin de semaine, les boutiques fermant progressivement leurs grilles, l’intensité de la circulation baissant de jour en jour. Vendredi je pouvais presque rouler les yeux fermés sur 3T2, un exploit impossible en temps normal.
Le bureau a commencé à se vider tout au long de la semaine, et ceux qui restaient avaient autre chose dans la tête que leur boulot. Jeudi, une entreprise vietnamienne voisine a disposé une table d’offrandes à son entrée, couverte de nourriture et de fruits, encens, bols et baguettes, bouteilles d’alcool. La porte reste ouverte et la réceptionniste se cache derrière l’ensemble. Les décorations rouge et or, souvent sponsorisées par de grandes marques, sont disposées au carrefour. Le centre ville est richement décoré de lampions et décors en polystyrène.
Cette semaine aussi, les fleurs ont convergé vers la ville. Surtout du jaune, en pot, à disposer à l’entrée de la maison, à acheter à tous les coins de rue, mais aussi de hautes orchidées hormonées. Quelques retardataires achètent encore les fruits qu’ils mettront en offrande le lendemain: pamplemousse, mangue, pastèque jaune et rouge et ananas (symbolisant la paix, la santé, le bonheur, la prospérité et la longévité), avant de rentrer rapidement chez eux. Les grosses pastèques (30 cm de diamètre) parfaitement rondes ont été déchargées des camions à l’angle de Điện Biên Phủ et Cao Thang et astiquées avec soin pour la vente. Les clients forcément veulent le fruit situé au pied de la pile, le marchand la récupère patiemment au prix de grands efforts.
Tôt samedi matin, je suis parti à la recherche d’une boulangerie. En passant dans les ruelles, je slalome entre les flaques d’eau mousseuses qui s’échappent de toutes les maisons: c’est le dernier grand ménage avec la fête. Un homme récure les carreaux du pas de porte avec un couteau, une femme frotte énergiquement le palier en face avec un balai brosse. Toute la ville sent le détergeant. Cette agitation n’est que la conclusion de plusieurs mois de préparations sérieusement planifiées et financées : la maison aura certainement été agrandie, modifiée ou redécorée en novembre ou décembre puis nettoyée à fond en janvier.
Au coin de Vo Van Thanh et Coa Thang, chez le garagiste, une famille – le père, la mère et le fils – en costume traditionnel de soie, rouge et or, attendent que le pneu de leur moto soit réparé. Plus loin un homme profite du calme relatif de la rue pour lire les news sur un portable, alimenté à la source – directement au poteau électrique.
Je trouve finalement ma boulangerie et peux traverser l’avenue Nguyễn Thị Minh Khai sans regarder. Quel bonheur.
Cet après-midi vers 14 heure, nous avons traversé la ville en moto dans une curieuse impression de déjà vu. Les boutiques fermées, dans la rue ni foule, ni motos ni échoppes, au feu rouge je suis seul à attendre. Le soleil tombe à la vertical réduisant les couleurs, le bitume fond par endroits. Comme un mois d’août en France.
C’est comme si on y était… merci pour ce reportage!
Bonnes fête du Têt! Merci, pour l’eau à la bouche, les couleurs, la musique et la chaleur.
Alexandre frigorifié et envieux (ici, la tramontane glaciale retrousse les poils)dit : Oh! ils ont chaud…
Oui Yvette et Alexandre, il fait ultra chaud ! Mais c’est l’hiver quand même, la température descend à 20 degrés la nuit.
Quel récit ! Je m’y suis vu. La rue Nguyen Hué est impressionnante, et prendre la 3T2 en étant tranquille : j’ai du mal à imaginer.
NTMK c’est ma rue 🙂 ! sans personne ça doit être quelque chose aussi.
Bonne fête! profitez du calme … bisous gelés