Chauffeur
Samedi, en fin d’après midi, j’ai rejoint Daniel à la brennhisla (maison des bouilleurs de cru) d’un village Sundgauvien (Sud de l’Alsace, entre Mulhouse et le Jura), où il a passé 3 tonneaux de 100 litres de poire, kirch et pomme. Il y était depuis 3 heures déjà et, à mon arrivée, les esprits somnolaient dans les vapeurs chargées d’alcool. J’arrivais lors du passage du dernier tonneau, et le ‘chauffeur’ de l’alambic (membre de l’association d’arboriculteurs à laquelle appartient l’installation) est sorti de sa torpeur et nous a décrit avec passion les enjeux et écueils de la distillation.
De la technologie de son alambic allemand (3 étages, chauffage au mazout, condensateur tout en cuivre à contre-courant), aux phases de coulée (tête et queue de coulée) et débit (épais comme une aiguille à tricoter ou comme la pisse d’une veille dame (!)), à l’art du nettoyage de la cuve (les fruits acides contribuent au nettoyage) et aux croyances des anciens (rajouter du sucre, faire du volume, maitrise empirique du procédé, recyclage des alcools d’une année sur l’autre), il était intarissable. Jusqu’au moment de le quitter, où il nous avoue que sa profession est de ‘chauffer’ un autre type d’installation : un incinérateur de centrale thermique. Là il brûle parfois de l’huile de vidanges des jours durant et la mauvais qualité du combustible rend la conduite de sa machine complexe. Quand il nous dit qu’il préférerait piloter son alambic toute la semaine, on le croit sur parole !
ça se fait encore beaucoup l’alambic et tout ça ou c’est à la limite du folklorique ?
Non non, c’est pas du folklore. Des passionnés entretiennent ce type de tradition : vergers, boutures d’arbres, récolte, mise en fut, distillation et maturation… Mais c’est vrai que ce type d’alcool n’est pas très prisé par nos générations !
Je viens de montrer l’article a mon pere qui a beaucoup aime tes photos. On parlait de ma grand-mere qui beneficiait du privilege du bouilleur de cru.
et elle bout quoi ?