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Un autre regard sur le Vietnam, enfin !

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Villages de métier au Vietnam

Villages de métier au Vietnam

À la découverte des villages de métier au Vietnam,
de Sylvie Fanchette et Nicholas Stedman,
aux éditions Thê Gioi (Vietnam).
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Faire du tourisme au Vietnam a quelque chose de frustrant pour les Occidentaux rompus à cette pratique dans les pays européens. Les tours organisés par les Sinh Café se ressemblent et vous entrainent sur des circuits parfaitement rodés, aux visites calibrées aux grandes masses. Les jeunes guides sont sympathiques mais ne connaissent pas leur pays ou ne savent pas en parler, les vieux sont séniles et radotent. Ils vous montrent une énième emprunte de bouddha dans une grotte au pas de charge, la nourriture, pour plaire aux goûts des touristes, est insipide, on vous emmène faire du kayak dans des lagons encombrés de déchets…

Le plus pénible reste la visite des pagodes sans qu’on vous explique ce que les gens viennent y faire, quand et comment. La culture vietnamienne contemporaine est rarement mise en valeur pour le touriste.
La méconnaissance des attentes et curiosité d’un touriste occidentale est grande et admirablement relayée par la platitude et l’uniformité de la majorité des guides touristiques internationaux les plus répandus. Bref, faire du tourisme au Vietnam m’a toujours paru pénible.
Pourtant une des richesses inédite du Vietnam s’affiche à tous les coins de rue et ne fait pas partie des circuits formatés : l’artisanat. Je ne parle pas du commerce d’artisanat local, celui évoqué au chapitre ‘Que ramener du Vietnam’ des guides touristiques. Je parle de l’artisanat de transformation, cet ensemble de métiers qui, à partir de la matière première, produit des objets finis (qui englobent logiquement, sauf copies chinoises, la première catégorie). Oui, l’artisanat de production est toujours vivant au Vietnam sous une forme primitive et inédite. Poterie, textile, menuiserie en bois ou bambou, papeterie, métallurgie, etc. Dès ma première balade dans les quartiers de Hanoi, j’ai été surpris d’y voir des ateliers de bobinages de moteurs électriques, des ateliers de ferblantiers qui proposent des hottes de cuisine sur mesure, des horticulteurs noyés au détour d’une ruelle, des tourneurs et imprimeurs terminant leur livraison à même la rue dans une forte odeur d’huile de machine, entre une cantine et un tailleur. Il est pourtant difficile de comprendre le fonctionnement de ces industries de quartier tant les interconnections entre les métiers, les fournisseurs, les lieux de production sont complexes. En vivant au Vietnam, on se contente donc d’observer quelques bribes visibles de ces réseaux, au hasard des sorties et des jours (mode d’emploi : à moto ou a pied, se perdre dans les ruelles et ouvrir des yeux). Le dernier exemple en date, cette ramasseuse de papier qui triait les confettis de notre déchiqueteuse au bas du bureau.

Enfin, un livre comble ces lacunes:  « À la découverte des villages de métier du Vietnam », de Sylvie Fanchette et Nicholas Stedman, est un livre-guide riche et extrêmement bien documenté sur les métiers dans la région de Hanoï. Le contenu du livre est inédit (pour une majorité de Vietnamiens aussi), car directement issu des recherches sur le terrain de chercheurs de l’IRD et de stagiaires officiant à Hanoi. Bien que très riche en informations et études, le livre est très accessible grâce à une écriture décontractée et une mise en forme proche du guide touristique et agrémenté de photographies de grande qualité (inédites elles aussi, quel bonheur). À travers 10 itinéraires dans des villages de métiers proches de Hanoi, on suit le cheminement des chercheurs qui ont pisté les circuits de production du papier Do, des meubles en bambou, des poteries ou des feuilles d’or. Jeu de piste culturel et industriel, on mesure aussi la dimension dynamique de ce tissu économique (les métiers qui disparaissent, qui déménagent ou renaissent, qui survivent entre 3 familles ou exploitent une région entière) et leur impact sur l’environnement. Au détour du livre, vous allez même comprendre à quoi sert le papier ramassé que j’évoquais plus haut !

À noter aussi que ce livre est peu cher (au Vietnam) et disponible en librairie simultanément en français, vietnamien et anglais. Joli travail !

NB: Un livre qui trouve sa place au sein du TOP 3 des bouquins sur le Vietnam, composé par ailleurs de:

  • Saigon, le chantier des utopies de Didier Lauras aux éditions Autrement.
  • Une famille de Saigon de Florence Nguyen Rouault aux édition De l’aube

6 Comments on “Un autre regard sur le Vietnam, enfin !”

  1. je bookmark l’article le temps d’acheter les deux qui je pense vont m’interesser A la découverte des villages de métier au Vietnam et Une famille de Saigon dont tu m’as déjà parlé..

  2. Et dans le TOP 3 des films et docus qui montrent le Vietnam tel qu’il est, je mettrais volontiers « Rêves d’ouvrières » de Tran Phuong Thao, et puis le docu que ma Jul est en train de monter pour Varan, qui montre la vie dans un immeuble de Saigon, excellent.

    Dis Gregory, tu ne connaitrais pas un artisan qui me réparerait mon alim 12V 1.7A?

  3. Belle promo pour ce livre, tu m’en mets l’eau à la bouche… (je fais un saut chez le libraire à la première occasion

  4. J’ai beaucoup entendu parler de “Rêves d’ouvrières”, mais jamais eu l’occasion de le voir. Tu sais où le trouver, Laurent ?

  5. on peut vous graver ça pour la prochaine fois où vous venez nous voir! 😉
    (attention, pas trainer, y a peut-être du déménagement vers Phnom Penh dans l’air, à suivre…)
    bises

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